La meute – Olivier Bal – XO Éditions – 2024 – ISBN 9782374485980

« L’Ange noir » a encore frappé. Le tueur s’en prend à des notables partout en France. Chaque fois, la victime est enterrée vivante et meurt étouffée.

À la sous-direction de l’antiterrorisme, Sofia Giordano et son partenaire Djibril Diarra, sous la houlette de leur supérieur, le capitaine Patrick Pelletier, cherchent à mettre la main sur ce tueur.

Une signature. Sur le monticule qui recouvre les cadavres, deux ailes d’oiseaux posées sur un tissu noir, placées en vis-à-vis. Une blanche et une noire… Après les premiers examens, il s’est avéré que la blanche provenait d’une colombe, la noire d’une corneille. C’est la symbolique qui a intéressé les agents de l’antiterrorisme. Djibril, en premier lieu, qui est musulman pratiquant. Le tombeau, les anges… Certains versets du Coran ainsi que quelques hadiths font mention des « tourments du tombeau ». Au moment de la mort, Nakîr et Munkar, l’ange du châtiment et celui de la miséricorde, interrogeraient pendant sept jours le défunt sur sa foi et ses actions passées. Si le jugement est favorable, les portes du ciel s’ouvrent à lui. Si ces créatures célestes estiment qu’il s’agit d’un mécréant, les parois de son tombeau se resserreront jusqu’à le broyer. Les différents meurtres mettent en scène tous ces codes : les deux ailes pour les deux anges, la fosse pour le tombeau, l’inhumation alors que la victime est toujours vivante. Tout en y ajoutant un élément clé, le drapeau noir, symbole de l’État islamique.

Depuis le premier crime, la direction du parquet antiterroriste nage en eaux troubles. Une équipe, celle de Sofia, a été mandatée pour enquêter sur l’affaire, sans que, officiellement, on parle encore d’attentat. Les cibles elles-mêmes, pourtant, ont valeur de symbole. À chaque fois, des notables et hommes politiques, certains proches des mouvances d’extrême droite. Toujours dans des régions différentes. Comme si l’assassin voulait répandre la terreur à travers le pays. Le premier, Bernard Dalliot, sénateur du Cantal, pilier du parti France Souveraine, habitant à Aurillac, retrouvé mort le 27 septembre. Le second, François Thévenoux, médecin, habitant à Dieppe, dont la dépouille a été découverte le 16 novembre. Le troisième, Yves Berchtold, dirigeant d’entreprise, dont le corps a été déterré dans le jardin de sa maison de campagne à La Haute-Ferronnière, le 19 janvier. Et aujourd’hui, Daniel Chassagne, député de la 2e circonscription du Var. Quatre hommes partageant souvent les mêmes idées, bien que non officiellement liés. Deux élus ont été assassinés, les pouvoirs publics prennent l’affaire au sérieux. Pour Sofia et ses pairs, le dossier est compliqué. Sans revendication officielle, difficile de pister l’assassin… La DGSI comme la SDAT s’accordent sur un point. Le tueur est à l’évidence un loup solitaire. Un homme qui se serait radicalisé seul, en consultant des vidéos et en interagissant avec certains groupes sur les réseaux sociaux. Encore plus difficile à traquer.

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Cela fait trois jours que Darya Mansour passe ses journées dans la salle d’attente du commissariat central du 10e arrondissement, où la 2e DPJ est basée. Cela fait trois jours que ça dure. Alors Gabriel, chaque matin, demande à la femme de quitter la salle d’attente. La réponse de la Syrienne est invariable : « Je veux que vous trouviez l’assassin de mon mari. Je reste ici. Je ne bouge pas. »

Gabriel Geller, « Le Grizzli » est chargé de l’enquête sur le décès du sans-papiers. Un de plus. Les mêmes affreuses lacérations que celles observées sur le corps d’un jeune Afghan, qui était étudiant en architecture avant de fuir son pays.

Daria et Hassan Mansour ont dû traverser huit pays et dépenser plus de 10000 euros pour rejoindre la France. Tout ça pour quoi ? Pour se retrouver veuve, seule, dans un pays qui ne veut pas d’elle. La Syrienne ne peut s’empêcher d’en vouloir à son mari. Hassan n’avait pas le droit de mourir, pas le droit de l’abandonner dans ce pays hostile ? Que va-t-elle devenir ?

Geller a bien suivi la piste levée par la veuve de Mansour. Le lieutenant de police s’est rendu à l’adresse de l’association indiquée par Darya. Le responsable est un type au visage de gravure de mode, mâchoire carrée, yeux bleus, cheveux gominés. Chemise cintrée sur ses pectoraux. Au doigt, une bague arborant un faciès de loup. Le jeune homme dégageait quelque chose d’étrange. Trop parfait. Il s’est présenté comme étant Victor Mirval, fondateur et président de Trait d’Union.  Pour le décrire, Darya Mansour avait eu ces mots : « Un prédateur. Il m’a fait si peur. »

En croisant plusieurs bases de données de la police, en passant des coups de fil à ses collègues, Gabriel Geller a appris que cette chevalière est un signe de ralliement pour la Meute, un mouvement d’ultradroite identitaire, basé à Lille. Le policier a eu du mal à lire jusqu’au bout leur manifeste découvert sur un obscur forum nationaliste. Un discours haineux aux relents nauséabonds, où les mêmes mots revenaient sans cesse. « Menace islamiste, grand remplacement, France en péril, soulèvement populaire, vrais Français »… Depuis deux ans, la Meute a mené bon nombre d’actions-chocs à travers la France, systématiquement filmées et partagées sur ses réseaux sociaux. Les images montrent des militants affublés de tee-shirts rouge et noir, munis de banderoles, hurlant dans des mégaphones les mêmes slogans : « La France, on l’aime, on la défend » ou « Les nôtres, avant les autres. » En 2023, le groupuscule est assigné en justice pour « provocation à la discrimination raciale et religieuse », après avoir tenté d’empêcher le projet d’expansion d’une mosquée dans le nord du Roubaix, en enchaînant plusieurs de ses militants autour du chantier. L’affaire a été classée sans suite.

En plus de ces coups de communication, la Meute dissimule une part plus sombre…

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Deux affaires en apparence distincte. En apparence seulement.

Un thriller implacable sur une machination diabolique. Une plongée glaçante dans le mécanisme du fanatisme.

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